[WSIS CS-Plenary] Le Canada doit éviter de cautionner le régime tunisien

Robert Guerra rguerra at lists.privaterra.org
Wed Oct 19 23:22:51 BST 2005


Forwarding the following article that appeared in on of the french  
newspapers in Canada..?



Texte paru dans le quotidien Le Soleil (Québec) concernant le Canada  
et les droits de la personne en Tunisie dans le cadre du SMSI.

Op-ed published this morning in a French daily  (Le Soleil, Québec)  
regarding the Canada and the Human Rights in Tunisia (WSIS)



Le Soleil
Opinions, mercredi 19 octobre 2005, p. A17
Répression, torture, intimidation...
Le Canada doit éviter de cautionner le régime tunisien

Ironie suprême, le Sommet mondial sur la société de l'information  
(SMSI), qui doit en principe consacrer le principe de l'accès  
universel à Internet, va se dérouler dans un pays qui se spécialise  
de plus en plus dans la violation répétée des droits humains,  
notamment la liberté d'expression !

Arrestations arbitraires, censure des médias et des sites Internet  
(Amnistie internationale et Le Monde diplomatique par exemple),  
procès bidon dignes de l'ère stalinienne, intimidation de  
journalistes et de défenseurs de droits humains, emprisonnement  
d'avocats, passage à tabac et torture sont au palmarès du régime du  
président Zine el-Abidine Ben Ali. Ce dernier profitera de la tenue  
du Sommet pour redorer son image sur le plan international.

Cela lui sera encore plus facile si on le voit en compagnie de chefs  
de gouvernement ou de ministres (du Canada comme du Québec  
d'ailleurs) qui lui serrent la main et contribuent tout sourire à sa  
légitimité.

Ces dernières années, les dénonciations contre Ben Ali se sont  
multipliées, notamment au moyen de rapports d'enquête menées par  
différents organismes. Le Groupe d'observation de la Tunisie, qui  
comprend notamment la Fédération internationale des journalistes et  
le World Press Freedom Committee, a mené trois missions en Tunisie  
ces derniers mois. Son plus récent rapport, dévoilé à Genève il y  
a quelques semaines, affirme que la répression s'aggrave en Tunisie.

Le rapport soutient que le gouvernement Ben Ali "cherche à réprimer  
plus avant la dissension à la veille du SMSI". Il invite aussi la  
communauté internationale à prendre ses responsabilités pour que la  
Tunisie cesse d'être un État policier. On y dénonce notamment  
l'emprisonnement d'un avocat des droits de l'homme, Mohamed Abou, qui  
a eu le malheur de critiquer dans Internet le gouvernement tunisien,  
alors que son épouse était "agressée et renversée par des  
policiers en civil" pendant la première journée du procès  
arbitraire de son mari.

Le gouvernement tunisien, qui se vante de tenir chez lui un sommet  
international sur la société de l'information en collaboration avec  
l'ONU, est le même qui bloque les sites Internet des dissidents et  
espionne les citoyens contraints d'utiliser des ordinateurs dans des  
cybercafés.

La censure de livres, la répression des organisations de citoyens, le  
démantèlement de la Ligue tunisienne des droits de l'homme, la  
déstabilisation de l'Association tunisienne des magistrats,  
l'interdiction faite au Syndicat des journalistes tunisiens de tenir  
son premier congrès en septembre dernier, le harcèlement policier et  
l'intimidation à l'endroit de journalistes et de dissidents sont  
autant de gestes tyranniques qui constituent le dossier noir de la  
Tunisie.

Par ailleurs, il fallait voir les faux représentants de la société  
civile tunisienne lors des rencontres préparatoires au SMSI qui ont  
au lieu à l'ONU, à Genève, en février et septembre 2005. Bien  
organisés, ces envoyés clandestins du président Ben Ali étaient  
prêts à tout pour saboter des rencontres où se discutaient les  
enjeux démocratiques, économiques, culturels et sociaux de la  
société de l'information (accès au savoir, aide aux pays  
défavorisés, liberté de presse, accès libre à Internet, etc.).

Sous prétexte de combattre le terrorisme et l'intégrisme islamique,  
Ben Ali a progressivement instauré un régime despotique. On  
s'étonne donc du portrait complaisant de la Tunisie que l'on trouve  
dans le site Internet du ministère canadien des Affaires étrangères  
et du Commerce international, qui vante son "économie prospère et  
dynamique [qui] s'accroît régulièrement et [son] environnement  
politique... stable et sécuritaire".

Si on y apprend que les échanges économiques entre le Canada et la  
Tunisie ont été de 110 millions $ en 2003, il est cependant  
troublant de constater que nous y exportons le papier journal  
vraisemblablement utilisé pour diffuser la propagande quotidienne de  
Ben Ali !

Et dire que le ministre Pierre Pettigrew consent à cet éloge d'un  
régime despotique. Il faut croire que les droits humains fondamentaux  
peuvent être ignorés de ceux-là même qui affichent avec  
ostentation leurs fameuses "valeurs libérales".

Intervenir au sein de la Francophonie

Certes, le cas tunisien n'est pas unique comme le prouve la Chine,  
qui n'a rien à envier au chapitre de la répression. Cependant, si le  
poids politique et économique du Canada est insignifiant pour la  
Chine, il peut par contre exercer une pression efficace sur le  
gouvernement tunisien. Il peut le faire directement ou indirectement,  
par exemple en s'alliant à la France pour élaborer et implanter des  
représailles de divers ordres de la part des pays de la Francophonie.

La Tunisie est membre de l'Agence intergouvernementale de la  
Francophonie, tout comme le Canada. Certes bien d'autres pays de la  
Francophonie sont irrespectueux des droits de l'homme et méritent une  
dénonciation aussi catégorique. Mais dans l'immédiat il faut  
s'assurer que la tenue du SMSI à Tunis ne soit pas un exercice de  
légitimation du régime Ben Ali.

À cet effet, le Canada ne doit déléguer aucun ministre à Tunis,  
encore moins son premier ministre. La participation canadienne aux  
débats peut tout aussi bien se faire par l'intermédiaire d'une  
délégation de diplomates, de fonctionnaires et de représentants de  
sa société civile.

En toute justice, il faut préciser que le Canada, au nom notamment  
des pays de l'Union européenne, des États-Unis et de quelques autres  
pays, a commencé à s'affirmer lors de la dernière plénière de  
Genève, à la fin de septembre. Il a alors dénoncé, de façon  
diplomatique bien entendu, les "incidents" survenus les jours  
précédents, référant à l'intimidation de la part de la  
délégation tunisienne. La Tunisie a tenté de réfuter cette  
critique, avec l'appui de pays également reconnus pour nier les  
droits de la personne, notamment l'Arabie Saoudite et Cuba.

S'il a le courage politique de ses prétentions démocratiques, Paul  
Martin peut faire pour le peuple tunisien ce que Brian Mulroney a  
fait pour aider le peuple d'Afrique du Sud, c'est-à-dire prendre  
l'initiative d'organiser une stratégie de boycott, notamment en ce  
qui concerne ses échanges économiques et ses relations  
diplomatiques. Ce que le Canada a déjà fait dans le cadre du  
Commonwealth, il peut le répéter dans le cadre de la Francophonie.

Marc-François Bernier

Membre de la Commission canadienne pour l'UNESCO et participant au  
Sommet mondial sur la société de l'information, à Tunis. L'auteur  
s'exprime à titre personnel.


Illustration(s) :

Marc-François Bernier
Le Sommet mondial sur la société de l'information se tiendra dans un  
pays qui ne respecte pas les droits humains.



Marc-François Bernier (Ph.D.)
Professeur agrégé
Coordonnateur du programme de journalisme
Département de communication
Université d'Ottawa
554 King Edward (local 204)
Ottawa (ON)
K1N 6N5
(613) 562-5800 (3828)
mbernier at uottawa.ca



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